Ce 7 mai, commence le Conclave afin de désigner le successeur du Pape François. C’est un moment rare qui fascine croyants, curieux et journalistes du monde entier : l’élection d’un nouveau pape. Que ce soit à la suite d’un décès (comme Jean-Paul II en 2005) ou d’une démission surprise (comme Benoît XVI en 2013), ce processus ancestral est un mélange unique de spiritualité, de rituels et de stratégie. Son nom : le conclave.

Mais que se passe-t-il vraiment derrière les portes de la Chapelle Sixtine ? Qui vote ? Comment ça marche ? Est-ce aussi secret que dans les films ? Et cette fumée blanche, c’est pas un peu théâtral ? Spoiler : si, mais on adore.

Voici le conclave expliqué simplement, sans catéchisme ni complot.

1. C’est quoi, le conclave ?

Le conclave est la réunion des cardinaux électeurs de l’Église catholique pour élire un nouveau pape. Le mot vient du latin cum clave, qui signifie « avec clé ». Pourquoi ? Parce que les participants sont enfermés dans un lieu fermé et sécurisé, sans contact avec l’extérieur, jusqu’à ce qu’un pape soit élu. Une sorte de loft spirituel sans caméras ni confessionnal (enfin, si, mais pas pour les mêmes raisons).

2. Qui y participe ?

Seuls les cardinaux de moins de 80 ans peuvent voter. Ce sont les plus hauts dignitaires de l’Église, souvent archevêques ou proches collaborateurs du Vatican. Ils sont en général autour de 115 à 120 (jamais plus de 120, selon les règles fixées par Paul VI dans les années 1970).

Ils viennent de tous les continents, ce qui donne une dimension mondiale à l’élection. En théorie, tout homme catholique baptisé peut devenir pape, même s’il n’est pas cardinal. En pratique ? Depuis des siècles, c’est toujours un cardinal.

3. Comment se passe le conclave ? (Étape par étape)

Voici le déroulé classique d’un conclave :

Avant le conclave :
Le siège papal est officiellement vacant après le décès ou la démission du pape.
Les cardinaux sont convoqués à Rome.
Une période de réunions préparatoires (appelées congrégations générales) permet aux cardinaux d’échanger, de faire le point sur les défis de l’Église, et – ne soyons pas naïfs – de discuter des papabili (les « favoris »).
Entrée en conclave :
Le jour J, les cardinaux se rendent solennellement à la Chapelle Sixtine, décorée par Michel-Ange, rien que ça.
Ils prêtent serment de silence et d’obéissance.
Les portes sont fermées à clé : à partir de là, c’est coupé du monde. Pas de téléphone, pas d’assistants, pas de TikTok. Juste les cardinaux, les prières, et l’Esprit Saint.

4. Le cœur du processus : les votes

Le scrutin :
Chaque cardinal inscrit le nom de son candidat sur un petit papier, le plie et le dépose dans une urne. Ensuite, un rituel précis s’enclenche :

Trois cardinaux (tirés au sort) comptent les votes.
Le dépouillement est public… pour les électeurs.
Les bulletins sont ensuite brûlés dans un poêle spécial.

La fumée :
Fumée noire (fumata nera) : aucun pape n’a été élu. On recommence.
Fumée blanche (fumata bianca) : Habemus Papam. Un pape a été élu.

Pour obtenir la bonne couleur, des produits chimiques sont ajoutés aux bulletins brûlés. (Avant, c’était beaucoup plus approximatif, et il arrivait que la foule hésite : "Blanche ? Noire ? Gris clair ?")

Combien de votes ?

Il peut y avoir jusqu’à quatre votes par jour (deux le matin, deux l’après-midi). Si aucun pape n’est élu après plusieurs jours, les règles peuvent évoluer pour faciliter l’élection, comme abaisser la majorité requise.

5. Combien de voix pour gagner ?

Le futur pape doit obtenir au moins deux tiers des voix. Donc si 120 cardinaux votent, il lui faut au moins 80 voix. Pas de majorité simple ni de second tour façon présidentielle : ici, on veut un consensus fort.

6. Et après l’élection ?

Quand un cardinal atteint le seuil requis, on lui pose une question toute simple mais redoutable :
« Acceptes-tu ton élection ? »

S’il accepte (ce qu’il fait dans 99,9 % des cas), il choisit un nom de pape. Ce choix est symbolique : François a par exemple pris ce nom en hommage à saint François d’Assise, symbole d’humilité et de pauvreté.

Ensuite, il est emmené se changer dans une salle voisine : la salle des larmes (oui, c’est son vrai nom). Elle contient trois soutanes blanches de tailles différentes, prêtes pour l’élu. C’est souvent un moment de grande émotion.

Enfin, le nouveau pape est présenté au monde depuis le balcon de la basilique Saint-Pierre, avec la fameuse formule :

Habemus Papam !
Nous avons un pape !

7. C’est aussi secret que ça ?

Oui. Le secret est l’un des piliers du conclave. Les cardinaux jurent de ne rien révéler de ce qui se dit ou se passe dans la chapelle. Les fuites sont rares et sévèrement condamnées.

Depuis 2007, tout enregistrement ou transmission d’informations est strictement interdit. Même les ballots de paille ont été bannis, car certains espéraient espionner les discussions par des moyens... peu catholiques.

8. Quelques anecdotes savoureuses

Le plus long conclave de l’histoire a duré plus de deux ans (1268-1271). On a dû enlever le toit du bâtiment pour faire pression sur les cardinaux… par la météo.

Le plus rapide ? En 1503, Jules II a été élu le jour même.

Le conclave qui a élu Jean-Paul II en 1978 a duré à peine trois jours.

Le pape Benoît XVI, élu en 2005, était considéré comme un favori. François, en revanche, était une surprise pour beaucoup.
 
Le conclave, c’est bien plus qu’un vote. C’est un rite millénaire, à la croisée de la foi, de la tradition et des enjeux contemporains. Derrière la fumée blanche, il y a des débats, des convictions, et parfois des tensions. Mais toujours une volonté : choisir celui qui guidera 1,3 milliard de catholiques à travers les défis du monde moderne.

Pas besoin d’être croyant pour être fasciné par ce processus unique au monde. Et si un jour vous voyez de la fumée s’élever du Vatican… vous saurez lire entre les lignes.

Conclave