Commander une pinte, un geste anodin, presque sacré. Pourtant, derrière ce mot simple (pinte) se cache une histoire aussi complexe qu’une triple fermentation.
D’où vient la pinte ?
La "pinte" est une mesure ancienne, dont les origines remontent au Moyen Âge. À l'époque, les unités de volume n'étaient pas standardisées. Chaque région, chaque royaume avait sa propre "pinte". En France, elle variait d’environ 0,95 litre à Paris à 1,66 litre à Toulouse ! Imaginez l’état des toulousains à l’époque...
Puis, au fil du temps, le besoin d’harmonisation s’est fait sentir. Mais ce n’est qu’au XIXe siècle, avec l'avènement du système métrique, que les vieilles unités ont commencé à disparaître, la "pinte" comprise. Néanmoins, dans la culture populaire (et au comptoir des bistrots), la pinte est restée synonyme d’un grand verre de bière, autour de 50 cl.
Une pinte n'est pas une pinte partout. Bah oui, d’ailleurs une "pinte" britannique est officiellement de 568 millilitres (soit 20 "fluid ounces"). Aux États-Unis, une pinte correspond à 473 millilitres. Et en France alors ? Techniquement… il n'y a pas de définition légale ! Rien dans les textes n’oblige un bar français à servir 50 cl quand il écrit "pinte" sur sa carte. Tout repose sur la tradition et l'honnêteté.
Tout allait tranquillement jusqu'à ce que récemment, un compte Instagram intitulé "Balance ta pinte" vienne réveiller la foule. Le principe de ce compte ? Dénoncer les bars qui servent des "pintes" dans des verres... de 37,5 cl.
Est-ce que vous connaissez le célèbre verre Granity d’Arcoroc. Vous le connaissez sûrement : base hexagonale, format costaud, souvent utilisé pour les cocktails. À côté, le vrai roi du comptoir pour la bière, c'est le Nonic, ce verre haut et arrondi à la lèvre évasée, parfait pour maintenir la mousse.
En versant une bière d'un Nonic dans un Granity, Balance ta pinte a prouvé que certains bars servaient moins que promis. De quoi créer une mini-révolution sur les réseaux, avec captures d'écran, dénonciations et débats enflammés.
Alors, escroquerie ou simple malentendu ? Juridiquement, pas si simple. Puisqu'aucune loi n'encadre précisément ce qu'est une "pinte" en France, un bar n’est pas obligé de vous donner 50 cl, sauf si c’est précisé sur la carte. En revanche, l'article L112-1 du Code de la consommation impose d'indiquer clairement les quantités servies.
Si vous vous sentez lésé, plusieurs options :
Demander un verre gradué.
Vérifier la carte pour voir si le volume est indiqué.
Signaler l’établissement sur SignalConso, la plateforme de la Répression des fraudes.
La pression monte (dans le bon sens)
Face à l'écho médiatique, plusieurs bars ont déjà changé leurs verres, plaidant parfois l’ignorance plutôt que la mauvaise foi. "Balance ta pinte" a même cessé de faire des "naming and shaming" systématiques, reconnaissant que tous les cas ne sont pas de la fraude manifeste.